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ardennes-medievales-450-1500

Vagabondage à travers l'actuel département des Ardennes pendant le millénaire médiéval, agrémentée de haltes diverses (sites, images, chartes traduites, ...)

Pistes ... Les origines de la seigneurie de Sery

 

Du pouvoir économique au pouvoir politique:

les origines de la seigneurie de Sery.

 

 

           C’est semble-t-il dans un acte de 1195 conservé aux Archives Départementales de l’Aisne qu’apparaît explicitement le titre seigneurial de Sery (1). Mais comme à l’accoutumée la réalité juridico-politique avait sans doute précédé l’appellation officielle de plusieurs décennies puisque le premier lignage émerge des brumes de l’Histoire au milieu du XIIème siècle, en la personne d’un certain Wiardus de Ciris.

 

          D’après le chroniqueur Gislebert de Mons, celui qu’il convient de désigner sous le nom de Gui Ier avait épousé Aelis, l’une des filles de Nicolas II de Rumigny, qui, devenue veuve avant 1155, se remaria au châtelain Hugues de Mézières, et dont une soeur, au nom inconnue, avait contracté alliance avec Raoul du Thour ! (2)

 

Bien que passablement compliquées, ces considérations généalogiques se devaient d’être rappelées, parce qu’elles expliquent pour une bonne part la place plutôt privilégiée de Gui II, le fils de Gui Ier, au sein de l’aristocratie régionale : frère utérin de Renaud, châtelain de Mézières pour le comte de Rethel et avoué de Donchery, c’est-à-dire installé sur un secteur clé de la Meuse moyenne, d’une part, cousin des puissants sires de Rumigny, maîtres de la Thiérache ardennaise, d’autre part, enfin proche de l’important et prolifique lignage du Thour, solidement implanté dans le sud du Porcien... Vassal du comte Geoffroy de Château-Porcien, il intervint à plusieurs reprises aux côtés de son suzerain, notamment en 1195 lorsqu’il s’agit de faire cesser le conflit survenu entre l’abbaye de Saint-Martin de Laon et quelques remuants chevaliers au sujet du bois de Wagnon (3). Dix ans plus tôt, il avait concédé à l’abbaye de La Valroy le libre passage à travers sa seigneurie pour le repos de l’âme de son neveu Eudes du Thour (4).

 

Mais l’environnement familial n’explique pas tout. La fortune politique des deux premiers Gui trouve aussi ses origines dans la puissance foncière. Une bulle du pape Lucius III confirmant en 1183 plusieurs aumônes abandonnées à l’abbaye de Saint-Nicaise de Reims évoque ainsi des biens donnés aux religieux par Gui de Sery, sa mère et sa parenté in villa de Bellomonte, c’est-à-dire à Beaumont en Avioth (5). Un demi siècle plus tôt, un acte de l’archevêque de Reims Renaud de Martigné rappelait les possessions que cette même abbaye avait acquises sous l’abbatiat de Joran, entre 1103 et 1139 ; or, parmi ceux-ci figure l’alleu dit de Hugues de Sery donné par Gillebert du Thour, Hugues de Wagnon et Goderan de La Tranloie ainsi que l’alleu de Hugues de Sery avec les champs, les prés, les bois, le ban, la justice et tout ce qui en dépend, donné en aumône par Raoul du Thour (6). Enfin, en 1115, l’archevêque Raoul le Verd abandonnait au dit monastère l’autel de Sery (7).

 

Que peut-on en déduire ? Ces différentes informations mettent bel et bien en évidence l’existence d’un puissant groupe familial d’alleutiers, c’est-à-dire de propriétaires fonciers libres de tout lien de dépendance envers l’aristocratie environnante, maître de plusieurs domaines, notamment Beaumont, La Tranloie et Sery. Il n’est pont exclu que ce dernier ait été doté d’un lieu de culte privé, transféré à l’aube du XIIème siècle à l’autorité archiépiscopale, soucieuse de récupérer sa mainmise sur la vie spirituelle de son diocèse.

 

Il paraît donc tout à fait légitime de penser, même si la preuve absolue fait défaut, que le premier Gui de la première moitié du XIIème siècle se rattachait à cette grande famille de propriétaires fonciers, selon des modalités encore non élucidées. L’onomastique ne semble ici d’aucun recours : ni le nom de Hugues, ni celui de Raoul (marque des seigneur du Thour), encore moins le si caractéristique Goderan, ne figure dans le patrimoine lignager de Sery, fidèlement attaché pendant trois générations à Gui. En revanche, la piste héraldique ne manque pas d’intérêt, puisque l’écu palé qui figure sur le sceau de Gui III de Sery (8) évoque curieusement celui des sires de Launois-Jandun, et même celui des châtelains de Montcornet en Ardenne - ces deux derniers lignages étant apparentés à la fin du XIIème siècle. Et il est probable que le marqueur onomastique du nouveau lignage seigneurial tire ses origines d'une alliance contractée de bonne heure avec une maison aristocratique illustre – mais laquelle ?

 

sceau-de-Guy-de-Sery.jpg

 

                                              sceau de Gui de Sery 1210 Arch dép Ard H 103

 

 

 

Notes

(1) Archives départementales de l’Aisne, H. 972, pièce n°2 (original)

(2) Archives départementales des Ardennes, H. 205, cartulaire de N.D. de Signy, p.15

Extrait de la chronique cité par C.G. ROLAND, Histoire généalogique de la Maison de Rumigny-Florennes, réédition 1982, p.141

(3) Archives départementales de l’Aisne, H. 972, pièces 1 et 2 (originaux)

(4) DESILVE, Analyse d’un cartulaire de l’abb. de La Valroy, Laon, 1877, acte 14  

(5)(6) (7) Bibliothèque Municipale de Reims, Ms. 1843, Cartulaire de Saint-Nicaise, actes 151, 48 et 14 ;

(8) SAIGE et LACAILLE, Trésor des Chartes du Comté de Rethel, tome 1, p. 120

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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Y
<br /> Excellent article.<br /> Dommage que les caractères utilisés pour sa rédaction soient difficilement lisibles !<br /> <br /> <br />
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